Philippe Delpech, Président Directeur-Général de Sonepar et François Beaume, VP Risques et Assurances, étaient récemment interviewés par l’Association pour le Management des Risques et des Assurances de l’Entreprise (AMRAE) à propos de la crise du COVID-19 et ses répercussions sur l’entreprise en termes de gestion des risques. Ils détaillent les actions prises en vue d’améliorer les process actuels à l’échelle du Groupe.
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Comment votre façon d’appréhender les risques a-t-elle évolué à l’aune de la pandémie ?
Philippe Delpech : Sonepar est présent dans 44 pays : cette pandémie à affecté nos collaborateurs, nos clients et nos activités dans pratiquement toutes nos régions et continue d’être une préoccupation quotidienne. Cet évènement nous enseigne que tout peut arriver, y compris l’impensable. Nous avons été frappés par la complexité d’appréhender et de gérer la multitude de décisions gouvernementales, quel que soit le pays, et par leurs impacts sur nos activités. Notre logique d’appréhension des risques en a été durablement modifiée et nous travaillons à intégrer ce retour d’expérience dans nos processus. La crise sanitaire nous rappelle, de manière très concrète, que la gestion des risques est l’affaire de tous et commence souvent par des actions simples, à la portée de chacun, avec en premier lieu le respect des gestes barrières. Complétées de mesures plus globales prises par les pouvoirs publics ainsi que de la campagne de vaccination à venir, ces actions permettront – nous l’espérons tous – de réduire le risque à un niveau acceptable et de revenir vers une certaine normalité. L’exemple de la Covid-19 et illustre bien la nécessaire compréhension du risque pour s’en prémunir efficacement.
En quoi vos attentes envers le Risk Management ont-elles changé ?
Philippe Delpech : Le contexte particulier du groupe Sonepar, alliant forte croissance, transformation digitale et organisationnelle, enjeux de développement durable, combinés à des facteurs exogènes tels que la montée progressive de certains périls (tensions géopolitiques et sociales, réchauffement climatique, risque cyber et sanitaire, etc.), ou encore le contexte tendu du marché de l’assurance, plaident pour davantage d’efficacité collective dans le domaine de la gestion des risques pour renforcer notre résilience. Nous avions déjà entrepris, bien avant la pandémie, des actions de renforcement dans ce domaine et allons les poursuivre dans les prochaines années avec l’objectif d’intégrer de manière plus systématique un réflexe risk management dans nos actions au quotidien, comme dans notre réflexion stratégique.
Quels ont été les apports de la cartographie des risques ? L’avez-vous adaptée après mars ?
Philippe Delpech : Notre analyse des risques en continu nous a permis de traverser cette crise. Nos équipes de risk management sont en train de repenser notre méthodologie et nos cycles de cartographie des risques pour rendre cet outil plus utile et opérationnel face aux défis actuels et ceux de demain. L’élaboration des futures stratégies ne se fera pas seulement à partir d’analyses passées. Ceci nous oblige à réinventer l’exercice.
Avez-vous défini et communiqué en interne sur votre appétit aux risques ? Celui-ci a -t-il évolué depuis la crise ?
Philippe Delpech : Pour un groupe familial comme le nôtre, l’appétence au risque est ancrée dans le temps long. Inscrite dans l’ADN du Groupe et partagée par tous, elle évolue graduellement, pas tant en réaction à cette crise, mais pour accompagner les grands mouvements sociétaux, les enjeux environnementaux et leur traduction dans notre modèle d’activité. C’est la preuve que les fondamentaux de notre modèle et notre appétence au risque sont pertinents. Ils permettent de sécuriser la résilience et la performance attendues par nos actionnaires et d’animer l’esprit de Sonepar : « Powered by Difference ».
Qu’est-ce que la pandémie a changé sur votre façon de voir la gestion des risques ?
François Beaume : Cette crise inédite dans l’histoire moderne, par son ampleur comme par sa durée, montre la nécessité, mais aussi la complexité, de disposer d’informations fiables pour permettre une prise de décision rapide. Nous avons mis en place dès le début de la pandémie un suivi hebdomadaire spécifique à cet effet, qui est toujours en place. Ce dispositif a été complété de guides pratiques à destination des pays pour leur permettre d’identifier et de structurer rapidement les mesures à mettre en œuvre. Ce support aux opérations est particulièrement apprécié des pays.
La pandémie a également confirmé, si besoin était, l’importance de l’anticipation, via une identification et une prévention des risques en amont couplées à un processus robuste de gestion de crise et des dispositifs de continuité d’activité. Alors que certains risques deviennent systémiques, la gestion des risques est plus que jamais un atout indispensable pour Sonepar afin de naviguer dans ce contexte complexe et évolutif. Elle contribue à préserver la performance et la résilience du Groupe en combinant efficacement diverse méthodes et outils, dont l’assurance.
En quoi les attentes de la direction générale envers le Risk Management ont-elles changé ?
François Beaume : En amont de la pandémie, la Direction générale du Groupe avait renforcé le positionnement de la fonction en intégrant le risk management, y compris les assurances, au sein du Secrétariat Général. Ceci permet de développer une approche transversale des risques intégrant dans la même dynamique les sujets risques, assurances, gouvernance, juridique et conformité. Cela facilite également des initiatives de co-construction avec d’autres directions (digital, stratégie, DRH) et la promotion du travail collectif.
Depuis cette intégration nos actions tendent à sécuriser l’organisation, outiller les acteurs et formaliser un minimum les pratiques pour aboutir à un socle commun, ce qui dans un groupe historiquement décentralisé comme Sonepar constitue un changement de fond. La forte croissance du Groupe rend cette étape de formalisation et de systématisation nécessaire pour permettre un déploiement et une appréhension plus large des principes du risk management et in fine conforter notre performance. Cela passe notamment par la sécurité des collaborateurs et des clients, qui reste, plus que jamais dans les conditions sanitaires actuelles, notre priorité.
Quelles modifications ont été apportées à la cartographie des risques ?
François Beaume : A ce stade aucune, mais nous travaillons à rendre cet exercice à la fois plus réactif et plus ancré dans nos modes de fonctionnement. Les actions de 2020 ont été focalisées sur la mise à jour en profondeur de notre cartographie des risques de corruption. En 2021 nous allons initier une mise à jour de la cartographie globale qui devrait intégrer à la fois des modifications méthodologiques, mais également de nouveaux risques.
Utilisez-vous des indicateurs nouveaux ? plus opérationnels ? plus fréquents ?
François Beaume : Les indicateurs risk management sont forcément évolutifs, car intimement liés aux risques qui les portent. Chaque mise à jour d’une cartographie des risques, qu’elle soit globale ou spécifique (corruption, RSE, etc.) apporte son lot de nouveaux risques, scénarios et indicateurs associés dont le suivi doit être régulier. En marge des exercices de cartographie, d’autres indicateurs sont mesurés régulièrement, c’est par exemple ce que nous avons mis en place depuis le début de la pandémie avec un suivi d’abord journalier, puis hebdomadaire de la crise, de ses impacts et de nos plans d’action. Nous suivons également des indicateurs focalisés sur la conformité, les risques cyber, la sinistralité, etc. qui restent pertinents.
Avez-vous constaté une évolution dans l’appétence au risque de votre entreprise ? Une injonction à trouver de nouvelles opportunités ?
François Beaume : Être un groupe familial structure notre appétence au risque inscrit dans un temps plus long, avec une perspective de pérennité et de transmission. Ceci n’est cependant pas antinomique de croissance et performance, bien au contraire, et encourage une prise de risque calculée et raisonnée en phase avec notre époque.